Thursday, August 9, 2018

Morlaix 44: Lettre à une Marraine






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Transcription

Le 14 Novembre 1944


Bien chère Marraine,


J’ai bien reçu votre lettre datée du 24 octobre. Je suis très heureux de recevoir de vos bonnes nouvelles. J’espère que la santé est bonne.
Quant á moi, cela va tout doucement, car j’ai passé de durs moments à Morlaix. J’ai de la chance de n’avoir pas été tué par les balles de mitrailleuses des gendarmes et FFI qui ont ouvert le feu sur nous durant la nuit. 

Personne ne savait rien du tout. Tout le monde était couché dans une accorderie sur la paille. Vers 4 heures du matin, un de nos camarades qui s’était levé pour faire pipi, nous a dit, en rentrant,  qu’il y avait, tout autour de  l’accorderie, plus de 100 gendarmes et FFI. A peine 5 minutes après, il y avait un capitaine et un comm….

Le capitaine donna l’ordre á ses hommes de rentrer vers nous. Aussitôt, il commanda:”Feu” sans aucune raison. 7 (plusieurs) de nos camarades blessés, ainsi qu’un gendarme.

Il y a plus de 10 jours que étions à Morlaix. Ils nous avaient dit d’embarquer sur le bateau, mais nous ne voulions pas partir sans paiement auparavant. Maintenant ils nous gardent comme des prisonniers de guerre. Nous couchons par terre, il fait froid, pas de couverture. Et c’est les FFI qui nous gardent! Nous sommes plus de 350, au milieu de fil de fer barbelés.

C’est bien pour la France. Elle nous regarde, même chose, rien du tout.

Bien de choses á Mr et Mme F, Mr et Mme M, et particulièrement grand-mere, Mr et Mme RM, et tous les gens de ..

Votre Filleul qui ne vous oubliera jamais.


André

Thiaroye 44 (Ben Diogaye Beye) vs Camp de Thiaroye (Ousmane Sembene). Bara Diokhane







THIAROYE 44 VS. CAMP DE THIAROYE


I
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During the mid-seventies, Senegalese writers Boubacar Boris Diop and Ben Diogaye Beye co-wrote a play titled “Thiaroye, Terre Rouge”, based on the tragedy that occurred in Thiaroye, Senegal, in 1944, when French troops assassinated hundreds of unarmed African soldiers who belonged to the Franch army. Around 1980, the government of Senegal founded Society Nationale de Promotion Cinématographique (SNPC), aimed at funding selected film projects. The company was placed under the leadership of reknowned Senegalese filmmaker Mahama Johnson Traoré. When SNPC made a call for proposals to produce arts first production, Diop and Beye , the co-authors of the  play “Thiaroye, Terre Rouge”  submitted a script  titled Thiaroye 44.

 SNPC's Selection Committee picked the Thiaroye 44 script as the first  SNPC funded film, among several talented contestants.  SNPC acquired the rights,  and hired Ben Diogaye Beye as the director of Thiaroye 44.

Pre-production started as of 1985, with the set design, the casting, the costumes, some preliminary shots, etc.

By Government Decree Mahama Johnson Traore, Director of SNPC was fired. Then film director Ousmane Sembene was appointed as the new CEO.

Mr Sembene’s first decision as the new CEO was to order the suspension of the Tharoye 44 production for an audit. After completion of  the audit, SNPC Selection Committee recommended that the production of Thiaroye 44 resumes.
Instead SNPC funded and produced the film Camp de Thiaroye," co- directed" by Ousmane Sembene and an unknown Thierno Faty Sow.


Historically, It is absolutely inaccurate to state that Sembene’s film  Camp d Thiaroye was ever banned in Senegal!

I was the lawyer who represented Ben Diogaye before the Senegalese courts when he filed a lawsuit against SNPC  for breach of contract. We won the case and, the Appeals Court of Dakar awarded monetary compensation to Ben, even though his film was "massacred".  Furthermore, I had personally attended the World Premiere of Camp de Thiaroye in Dakar, in the company of…Ben Diogaye Beye at the International Trade Center in Dakar. It was a huge "Soirée de Gala" attended by the Senegalese establishment. The next day the movie Camp de Thiaroye received rave reviews in the official daily Le Soleil, the  day after the World Premiere, that was attended by the whole establishment, even though some survivors had issue with the film.
And thanks God, I had kept some newspaper clips of the era in my archives. I have cut them to create the above collage.

Yes indeed, Ousmane Sembene was the Father of African Cinema. yet  the whole story cannot be told without reminding this dark episode of an otherwise ifantastic career.



Bara Diokhané



Wednesday, August 8, 2018

Morlaix 44, avant Thiaroye 44

Retour tragique des troupes coloniales. Le journal L'aurore titre: « 11 novembre sanglant à Morlaix: cent gendarmes tirent sur des Sénégalais désarmés

 (…). Deux mille Sénégalais récemment délivrés de camps de concentration et groupés à Morlaix attendaient depuis quelques jours leur départ pour l'Afrique. Après plus de quatre ans de captivité, leur arriéré de solde était très important, aussi en attendaient-ils le paiement avec fébrilité. La plupart furent réglés sauf 325 d'entre eux, cantonnés (baugés conviendrait mieux) au quartier de la Madeleine. Le jour du départ arriva et ces 325 infortunés refusèrent d'embarquer avant d'avoir été alignés en solde, disant qu'ils ne voulaient pas être dupes comme leurs pères, qui en 1918 après avoir versé généreusement leur sang pour la France, étaient rentrés au pays sans solde, que depuis ils attendent toujours. Nos braves bamboulas restent inflexibles et inséparables dans leur résolution et le bateau partit sans eux. (…). Vendredi, l'arrivée insolite d'un fort contingent de gendarmes harnachés et armés en vrais guerriers excita quelque peu la curiosité populaire. (…). Vers cinq heures du matin, l'attaque commença. Des gendarmes pénétrant dans la bauge-dortoir intiment à tout le monde de sortir illico en joignant le geste à la parole empoignant les hommes en caleçon ou à demi vêtus pour les faire sortir de force. Ce réveil surprise ne fût pas du goût des Sénégalais qui, les premiers moments de stupeur passés, comprirent le genre de brimades et de provocations dont ils étaient l'objet. (…) Tout à coup dans la nuit claqua un coup de feu. Ce fut le commencement du drame: qui avait tiré? D'après la version officielle ce serait un Sénégalais? Mais nous nous refusons d'y croire, car ils étaient venus désarmés de leurs camps et ils ne possédaient que quelques baïonnettes-souvenirs dont ils n'avaient pas fait usage. (…) Ce fut la fusillade générale... Entre temps les maisons du voisinage furent assiégées par les gendarmes pour en faire sortir les Sénégalais que les habitants hébergent par charité (…). Triste aube du 11 novembre, disent les habitants de ce paisible et populaire quartier qui furent réveillés par le vacarme. »

Monday, August 6, 2018

L'injuste condamnation du Caporal Antoine H

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Par jugement du 6 mars 1945, le tribunal militaire permanent de Dakar a déclaré le caporal Antoine HX... coupable :
- d’avoir refusé d’obéir et, hors le cas de force majeure, de n’avoir pas exécuté un ordre relatif au service à lui donné par son supérieur, l’aspirant Y..., qui lui ordonnait de sortir d’une baraque pour aller au rassemblement,
- d’avoir outragé par paroles l’aspirant Y..., du 1er régiment de tirailleurs sénégalais, qu’il savait être son supérieur, en lui disant, alors que ce sous-officier lui donnait l’ordre de sortir d’une baraque et de se rendre au rassemblement : « je suis chez moi ici, je n’ai pas d’ordre à recevoir et personne ne doit me faire sortir d’ici », ne sortant que sous la menace du revolver en vociférant : « si le sang noir coule aujourd’hui, attention à vous, ce sera la fin de tout le monde ici », avec la circonstance que ces outrages ont été prononcés à l’occasion du service,
- d’avoir refusé d’obéir et, hors le cas de force majeure, de n’avoir pas exécuté un ordre relatif au service à lui donné par son supérieur, le lieutenant Z..., qui lui ordonnait de sortir des rangs, ordre qui ne fut exécuté que sous la menace de la baïonnette,
- d’avoir participé à une rébellion commise par des militaires armés, au nombre de huit au moins, envers la force armée, sous les ordres du lieutenant colonel A..., commandant le 6ème régiment d’artillerie coloniale, détachement qui, agissant pour maintenir l’ordre la discipline et l’exécution des lois et règlements militaires, encerclait un groupement de tirailleurs indigènes qui n’obéissaient plus aux ordres de leurs chefs et s’opposaient à la progression des troupes chargées de les rassembler,
ces infractions ayant été commises le 1er décembre 1944, à Tiaroye (Sénégal) .
Après avoir refusé à Antoine HX... le bénéfice des circonstances atténuantes, le tribunal l’a condamné à la peine de dix années de détention ainsi qu’à la dégradation militaire et lui a interdit de paraître, pendant cinq années, dans les lieux qui seraient déterminés par le gouvernement avant sa libération.
Par décision du 17 avril 1945, le tribunal militaire de cassation permanent d’Alger a rejeté le recours formé par Antoine HX... contre cette condamnation.
Celui-ci, qui était détenu depuis le 1er décembre 1944, a bénéficié d’une mesure de suspension d’exécution du jugement, prise par le ministre de la guerre, le 30 mai 1947, et de la mesure d’amnistie édictée par l’article 39 de la loi n° 47-1504 du 16 août 1947.


Thursday, August 2, 2018

Thiaroye 44 vs. Camp de Thiaroye

THIAROYE 44 vs CAMP DE THIAROYE




Je suis l’avocat qui avait intenté et gagné- en première instance et en appel- le procès de Ben Diogaye Beye, scénariste du film Thiaroye 44, contre la Société Nationale de Promotion Cinématographique
Vers la fin des années 70 Ben Diogaye Beye et Boubacar Boris Diop avaient co-écrit une pièce de théâtre dénommée “Thiaroye, Terre Rouge.”
Au milieu des années 60 l’Etat du Sénégal mit sur pied la Société Nationale de Promotion Cinématographique (SNPC), avec à sa tête le cinéaste Mahama Johnson Traoré
La SNPC lançait un concours de scénario á financer et le scénario Thiaroye 44 de Ben et Boris fut sélectionné par le Comité de Lecture
La pré-production du film commença avec les repérages, les décors, le recrutement d’acteurs, etc...
Subitement Mahama Johnson Traoré directeur de la SNPC fut limogé
Le cinéaste Ousmane Sembéne fut nommé Président du Conseil d’Administration de la SNPC
LA SNPC suspendit le projet Thiaroye 44, et à la place, finança le projet Camp de Thiaroye d’Ousmane Sembéne, avec comme co-réalisateur, un illustre inconnu du nom de Thierno Faty Sow

Camp de Thiaroye fut le seul film financé par la SNPC avant de fermer ses portes

Le procès gagné en 1989 contre la SNPC était basé sur une action en responsabilité pour rupture abusive de contrat. Dés dommage-intérêts furent alloués á Ben Diogaye Beye

J’affirme ici que I’assertion de certains auteurs selon laquelle le film Camp de Thiaroye fut banni au Sénégal est fausse, car j’ai eu à assister personnellement à la Première mondiale du film Camp de Thiaroye à Dakar, en compagnie de...Ben Diogaye Beye. Et heureusement, je détiens dans mes archives les coupures de presse du lendemain, notamment la Une titrée “Grande Premiere “ du Quotidien gouvernemental Le Soleil. Traitement royal s’il en faut.
La vérité  finira par s’impose, non seulement sur les mobiles du crime de guerre et!ou crime contre l’humanité perpétré à Thiaroye,, mais aussi sur le massacre du film Thiaroye 44 de Ben Diogaye Beye par le film Camp de Thiaroye d’Ousmane Sembene..

Me Bara Diokhané

Manifesto


Pour un procès en révision des tirailleurs «sénégalais» rescapés du massacre de Thiaroye (1er décembre 1944 Sénégal)



Veille. Collage, 2003. Bara Diokhane

Le 5 mars 1945, un tribunal militaire français a condamné 34 tirailleurs ex-prisonniers de guerre innocents.
70 années après il est temps que justice leur soit rendue.
Comme Dreyfus, ils ont droit à un procès en révision pour faire annuler leur condamnation et pour que cesse ce scandale de la République.
Le 5 novembre 1944, plus de 1600 ex-prisonniers de guerre qui avaient passé, pour le plus grand nombre, quatre années de captivité dans les Frontstalags en France après s’être battus contre l’ennemi allemand, ont quitté Morlaix pour rejoindre leur terre natale. C’était le premier contingent de tirailleurs dits «sénégalais» à rejoindre l’Afrique occidentale française (AOF) pour être démobilisés. Après s’être évadés, certains avaient rejoint les rangs de la Résistance (Forces françaises de l’intérieur).
Le 1er décembre 1944 à la caserne de Thiaroye au Sénégal, ces rapatriés qui avaient réclamé leur rappel de solde de captivité ont été rassemblés sur ordre des officiers devant les automitrailleuses, qui ont tiré faisant officiellement 35 morts alors qu’il manque, selon les sources, plus de trois cents ex-prisonniers de guerre.
Le 5 mars 1945 à Dakar, trente-quatre «mutins» rescapés du massacre ont été condamnés à des peines pouvant aller jusqu’à dix années d’emprisonnement avec dégradation militaire, interdiction de territoire, amendes pour rébellion armée, refus d’obéissance, outrages à des supérieurs.
Le travail des historiens a fini par révéler des documents falsifiés et montrer que le récit officiel est, en réalité, un mensonge d’État qui a permis de camoufler la spoliation des soldes de captivité, le massacre prémédité, le nombre exact de victimes et de faire condamner des innocents.
Ces prétendus «mutins» ont bénéficié des lois d’amnistie en 1946 et 1947 mais demeurent coupables.
Le doute sur leur culpabilité est désormais acquis et rien ne peut s’opposer à ce que ces hommes bénéficient à titre posthume de l’article 622 du code de procédure pénale prévoyant la révision du procès lorsqu’après une condamnation, vient à se produire un fait nouveau ou à se révéler un élément inconnu de la juridiction au jour du procès.
Il a fallu attendre soixante-dix ans avant qu’un président de la République n’évoque cet événement et ne se montre disposé à reconnaître la réalité des faits. Il a annoncé solennellement sa volonté de réparer une injustice sans pour autant évoquer la saisine de la commission permettant d’innocenter ces hommes.